vendredi 18 février 2011

Abou El Kacem Chebbi

Lorsqu'un jour le peuple veut vivre

Force est pour le Destin, de répondre

Force est pour les ténèbres de se dissiper

Force est pour les chaînes de se briser.

Avec fracas, le vent souffle dans les ravins

au sommet des montagnes et sous les arbres disant :

"Lorsque je tends vers un but,

je me fais porter par l’espoir

et oublie toute prudence ;

Je n’évite pas les chemins escarpés

et n’appréhende pas la chute

dans un feu brûlant.

Qui n’aime pas gravir la montagne,

vivra éternellement au fond des vallées".



Je sens bouillonner dans mon cœur

Le sang de la jeunesse

Des vents nouveaux se lèvent en moi

Je me mets à écouter leur chant

A écouter le tonnerre qui gronde

La pluie qui tombe et la symphonie des vents.



Et lorsque je demande à la Terre :

"Mère, détestes-tu les hommes ?"

Elle me répond :

"Je bénis les ambitieux

et ceux qui aiment affronter les dangers.

Je maudis ceux qui ne s’adaptent pas

aux aléas du temps et se contentent de mener

une vie morne, comme les pierres.

Le monde est vivant.

Il aime la vie et méprise les morts,

aussi fameux qu’ils soient.

Le ciel ne garde pas, en son sein,

Les oiseaux morts

et les abeilles ne butinent pas

les fleurs fanées.

N’eût été ma tendresse maternelle, les tombeaux n’auraient pas gardé leurs morts".

Par une nuit d’automne,

Lourde de chagrin et d’inquiétude,

Grisé par l’éclat des étoiles,

Je saoule la tristesse de mes chants,

Je demande à l’obscurité :

"La vie rend-elle à celui qu’elle fane

le printemps de son âge ? "

La nuit reste silencieuse.

Les nymphes de l’aube taisent leur chant.

Mais la forêt me répond d'une voix

aussi douce que les vibrations d'une corde :

" Vienne l'hiver, l'hiver de la brume,

l'hiver des neiges, l'hiver des pluies.

S'éteint l'enchantement,

Enchantement des branches des fleurs, des fruits,

Enchantement du ciel serein et doux,

Enchantement exquis des prairies parfumées.

Les branches tombent avec leurs feuilles,

tombent aussi les fleurs de la belle saison.

Tout disparaît comme un rêve merveilleux

qui brille, un instant, dans une âme,

puis s'évanouit.

Mais restent les graines.

Elles conservent en elles le trésor

d'une belle vie disparue..."



La vie se fait

Et se défait

Puis recommence.

Le rêve des semences émerge de la nuit,

Enveloppé de la lueur obscure de l'aurore,

Elles demandent :

"Où est la brume matinale ?

Où est le soir magique ?

Où est le clair de lune ?

Où sont les rayons de la lune et la vie ?

Où est la vie à laquelle j'aspire ?

J'ai désiré la lumière au-dessus des branches.

J'ai désiré l'ombre sous les arbres"



Il dit aux semences :

"La vie vous est donnée.

Et vous vivrez éternellement

par la descendance qui vous survivra.

La lumière pourra vous bénir,

accueillez la fertilité de la vie.

Celui qui dans ses rêves adore la lumière,

la lumière le bénira là où il va.

"En un moment pas plus long

qu'un battement d'ailes,

Leur désir s'accroît et triomphe.

Elles soulèvent la terre qui pèse sur elles

Et une belle végétation surgit pour contempler la beauté de la création.

La lumière est dans mon cœur et mon âme,
Pourquoi aurais-je peur de marcher dans l'obscurité ?

Je voudrais ne jamais être venu en ce monde
Et n'avoir jamais nagé parmi les étoiles.
Je voudrais que l'aube n'ait jamais embrassé mes rêves
Et que la lumière n'ait jamais caressé mes yeux.
Je voudrais n'avoir jamais cessé d'être ce que j'étais,
Une lumière libre répandue sur toute l'existence.

Auteur: Abou El Kacem Chebbi
 
Ce poème éclaire d'un jour nouveau ce magnifique mouvement populaire issu de la jeunesse.
 
 

2 commentaires:

salim a dit…

Magnifique poème qui devrait être traduit dans toutes les langues et enseigné dans toutes les écoles du monde avec la Déclaration des droits de l’homme.

Tahar, coeur de lyon a dit…

C'est la raison pour laquelle je l'ai mis dans on blog.